Interview : Didier Talla Nembot raconte son expérience en Irak - Allez Les Lions
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Interview : Didier Talla Nembot raconte son expérience en Irak

Pensionnaire d’Al Najaf FC, et passé par Al Mina, Didier Talla Nembot évolue en Irak depuis plus de 5 ans. Le milieu de terrain camerounais s’est bâti une solide réputation en Asie. International camerounais passé par plusieurs catégories jeune des sélections nationales, Talla Nembot (33 ans) pense déjà sa reconversion. Interrogé par notre rédaction Allez Les Lions, il est revenu sur son aventure en Irak, dans un pays qui est plus connu pour son instabilité politique et sécuritaire que par son football.

Bonjour Didier, vous évoluez en Irak depuis 5 ans maintenant. Comment ça se passe là-bas depuis votre arrivée en 2017 ? On lit beaucoup de choses négatives sur le pays, notamment sur le plan sécuritaire, est-ce vrai ? Y a-t-il eu des problèmes relatifs à la sécurité depuis que vous y êtes ?

Je suis arrivé ici en 2017. On m’a très bien accueilli. Ayant déjà vécu en Tunisie, au Soudan, à Omam et en Espagne, j’avais cette facilité à m’intégrer ici en Irak. Évidemment, tout le monde parlait de sécurité et j’avais un peu peur mais en arrivant en Irak, les agents m’ont bien rassurés. On m’a installé chez moi et un véhicule a été mis à ma disposition. C’est sécurisé. Je ne marche pas avec un policier. Je vais à l’entraînement et aux matchs normalement. Ça fait cinq ans que je suis là et je n’ai jamais connu un problème lié à l’insécurité. Il y a certes des problèmes politiques mais depuis une dizaine d’années, ça se passe bien ici. Ces problèmes n’ont jamais impacté le football. 

Comment sont les conditions de travail là-bas ? C’est mieux financièrement que dans de nombreux autres championnats ? Les infrastructures sont bonnes ?

Les conditions de travail sont professionnelles parce que pour avoir évolué au Cameroun, ici est de loin, mieux que le championnat camerounais. Les gens de l’extérieur se disent qu’ici, il y a des problèmes, il y a l’amateurisme. Ce n’est pas le cas. Nous avons un grand terrain d’entraînement, un grand stade avec des annexes. Les conditions de travail sont tellement bien. Je me dis au Cameroun, quand tu t’entraînes sur la terre pour aller jouer sur le gazon, c’est tout de même déplacé pour un footballeur professionnel. Ici, on ne connaît pas de mauvais terrain. Nous jouons dans de grands stades comme Japoma, Mfandena. Ici, il n’y a pas de problème d’infrastructure. Ici, on est vraiment loin de l’idée des gens qui se disent qu’en Irak il y a des problèmes de guerre, des problèmes de mentalité. Les Arabes sont de bonnes personnes donc ça se passe bien. Je suis même capitaine de mon équipe.

Justement, on vous a déjà aperçu avec le brassard, c’est une grosse marque de confiance du club, surtout envers un étranger ?

Je suis dans le club depuis trois saisons et c’est normal qu’on me donne le brassard vu mon rendement. Si on te paie une  certaine somme d’argent et que tu n’es pas à la hauteur, on va résilier ton contrat. C’est donc aussi par rapport à mes performances et mon comportement. J’ai vécu en Tunisie, j’étais vice capitaine. J’ai joué à Panthere de Bagangte, j’y étais capitaine. De même quand j’évoluais à Ebolowa. J’ai un comportement exemplaire. Je respecte mes coéquipiers, l’administration, les supporteurs et je travaille beaucoup, aussi bien individuellement que collectivement. C’est pour toutes ces raisons que l’on m’a donné le brassard.

On a vu plusieurs anciens joueurs d’Elite One évoluer en Irak, comment expliquez vous cet exode vers ce pays ?

Il y a énormément de joueurs camerounais ici. Il y a Cédric Abogo qui joue à Zakho SC, un club de première division. Ils sont huitièmes. Il est aussi passé par le championnat camerounais. Il y a Jacob Youmbi, qui a joué a Astres de Douala et Union. Son club c’est Naft Al-Basra. Il y a aussi Mundi qui est capitaine de son club. C’est l’ancien capitaine d’Union de Douala. Le mercato dernier, Thierry Anang est arrivé, l’ancien joueur de Panthere de Bagangte. Nous sommes 7 à 8 joueurs camerounais dans le championnat. Je conseille aux gens de venir quand ils ont des offres pour l’Irak car ici, on respecte les engagements. Tu as la possibilité de déposer une plainte en cas de retard de paiement de salaire donc je pense que c’est un bon coin pour venir s’exprimer. C’est vrai qu’avec l’arrivée de Samuel Eto’o, le football camerounais commence à devenir attractif mais ici il y en a plus car ils ont de l’avance sur le Cameroun et beaucoup d’autres pays en Afrique.

On a également vu votre coéquipier Thierry Anang débarqué à Najaf, avez-vous contribué à le faire venir dans l’équipe quand on connaît l’aura que vous avez sur place ?

Thierry Anang, j’ai joué avec lui dans plusieurs clubs. C’est un ami de longue date. J’ai joué avec lui à Panthere. Il est arrivé et je l’ai bien encadré en tant que grand frère. Il a un bon comportement. C’est un grand professionnel. On a joué ensemble en Tunisie à l’AS Marxa. Ici, on avait un problème d’attaquant et je l’ai proposé au club avec insistance. Il est arrivé. Il a 5-6 buts en 8 matchs. Je ne l’ai pas faire venir parce que c’est mon ami mais parce qu’il est performant. Je ne me dis pas que j’ai aidé un Camerounais mais plutôt que j’ai aidé mon club à recruter un bon attaquant. 

Envisagez vous de terminer votre carrière en Irak ? Pensez-vous déjà à la reconversion quand on sait que vous avez investit dans l’immobilier au Cameroun ? Avez-vous des idées ?

Bien sûr, j’envisage de terminer ma carrière en Irak. Aujourd’hui, j’ai 33 ans. J’ai déjà joué près de 15 ans en première division. Je suis fatigué lors des matchs. Je ne m’entraîne plus beaucoup. J’essaye de jouer plus de matchs que d’entraînement. Je pense que je vais arrêter le foot bientôt. Je préfère arrêter avec des dirigeants que je connais. Avec mes connaissances, je peux permettre à certains jeunes de venir ici ou certains grands. Ici, ils aiment bien les joueurs de 25-28 ans, déjà un mature. Au maximum à 35 ans, je pourrai arrêter ma carrière. Je mérite ma carrière. C’est vrai que je n’ai pas joué dans de très grands clubs mais j’ai eu la chance de disputer la Ligue des Champions africaine et asiatique. Pour ma reconversion, je ne sais pas encore ce que je vais faire concrètement mais je sais que je vais aider les jeunes à voyager.
L’immobilier est un bon investissement surtout pour nous les footballeurs qui n’avons pas de retraite. On joue 11 à 12 ans et on arrête le football. Si tu fais des erreurs et que tu n’arrives pas à investir ou garder un peu d’argent de côté, 2-3 ans après avoir arrêté le football, tu vas misérer. On voit beaucoup de footballeurs qui se retrouve sans argent à cause de mauvais conseillers et des arnaques. Nombreux sont les footballeurs qui se font arnaquer. J’ai eu la chance d’avoir des personnes autour de moi qui me permettent de bien me positionner, de bien m’organiser. Ma femme m’a aussi beaucoup aidé dans ce processus. Je peux être fier de ce que j’ai accompli. Je vais continuer à aider les footballeurs sur ma page. Je peux arrêter ici mais j’ai envie de rejouer le championnat camerounais et arrêter en beauté.

Enfin, pouvez-vous revenir en quelques mots sur votre expérience à l’équipe nationale du Cameroun, toute catégorie confondue ?

J’ai joué avec les espoirs, A’ et A. J’avais été présélectionné avec Javier Clémente. A l’époque, j’étais le capitaine de Panthere. J’ai joué pas mal de matchs avec la sélection. J’ai des très bons souvenirs de l’équipe nationale et c’est toujours une fierté de porter le maillot de son pays. Beaucoup on eu une bonne carrière sans pourtant jouer en sélection. Aujourd’hui, je peux dire que je suis international camerounais. C’est une opportunité, pas financière mais familiale de porter le maillot de son pays. Je suis fier car j’ai énormément travaillé pour arriver à un certain niveau car je n’avais pas de soutien ou de conseiller et personne dans ma famille qui était footballeur à part peut-être mon père qui était un ancien arbitre. Peut-être qu’avec des conseilleurs, j’aurais pu aller plus loin mais aujourd’hui, je suis très fier de mon parcours. J’ai fait ce qu’un jeune footballeur aimerait faire dans sa vie.  Je dois penser à l’après football et j’ai des ambitions. Je veux être éleveur, agriculteur, agent de joueurs. Je veux aussi être un conseiller. Si un club a besoin de mes services pour pouvoir donner des conseils aux jeunes, je serai disponible et surtout dans mon pays. 

Didier Talla Nembot en équipe nationale A’ du Cameroun
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