Lorina Essomba Mbega, l’escrimeuse camerounaise, vient de réaliser l’exploit de remporter la médaille d’or en sabre dame aux récents championnats d’Afrique qui se sont tenus au Maroc. Cette première médaille historique pour le Continent dans cette discipline marque une étape importante, sachant que l’escrime est encore un sport relativement peu pratiqué dans le pays. Notre rédaction est allée à la rencontre de cette jeune femme ambitieuse qui rêve désormais de décrocher une qualification pour les Jeux olympiques. Découvrez dans cet entretien, qui est Lorina Essomba Mbega, son parcours et ses ambitions.
Journaliste : Bonjour Lorina Essomba Mbega. Félicitations pour cette médaille historique, merci pour cet entretien exclusif au média Allez Les Lions.
Lorina Essomba : Bonjour Claude Stéphane. Merci pour vos félicitations, c’est une fierté pour moi d’avoir permis à mon pays de rentrer dans l’histoire.
Journaliste : Qui est Lorina Essomba Mbega ? Comment a-t-elle découvert l’escrime ?
Lorina Essomba : Je m’appelle Lorina Essomba, j’ai 21 ans, j’habite à Aubagne c’est une ville à côté de Marseille. Je suis née le 16 décembre 2002 à Thionville, c’est une petite ville au nord-est de la France. J’ai commencé l’escrime à l’âge de 7 ans. J’ai découvert cette discipline grâce à maman, je trouvais pas de ce sport. J’avais déjà essayé plusieurs activités qui m’avaient pas plu et ma mère, elle m’a dit de tester parce qu’elle aimait bien l’escrime. Elle était fan de Laura Flessel-Colovic. J’ai essayé, j’ai essayé le sabre plus particulièrement et depuis ce jour j’ai pas arrêté.
Journaliste : Vous êtes né et avez grandi en France, vous découvrez l’escrime en France, comment vous retrouvez-vous à compétir pour le Cameroun ?
Lorina Essomba : J’ai évolué dans le groupe France dans les catégories jeunes de cadet à junior, là je suis passé senior il y a deux ans. Durant ma dernière année junior, à la fin de la saison je me suis blessé. Ça m’a valu un an sans entraînement, sans compétition donc j’étais plus dans le groupe France du coup. Et je me suis dit, c’est le moment où jamais de changer de nationalité. C’est comme un nouveau départ, je voulais recommencer les choses. Et puis, le système français, la fédération, ça me plaisait plus. Donc je me suis dit pourquoi pas [changer de nationalité et obtenir celle camerounaise, ndlr]
Journaliste : Comment vous êtes-vous senti après avoir remporté cette médaille d’or historique aux championnats d’Afrique d’escrime ?
Lorina Essomba : Après la médaille au championnat d’Afrique, je suis très contente. Franchement je réalise pas encore, surtout que ça été une année très compliquée pour moi. J’ai failli laisser tomber à plusieurs reprises et ça prouve que le travail paye toujours. C’est une victoire qui me touche parce que c’est ma première victoire continentale sur un championnat comme celui-ci. Puis, en plus de ça, c’est une première médaille pour le Cameroun. C’est pas n’importe laquelle, c’est une médaille d’or. Donc, ça me motive encore plus pour les saisons à venir, et pour travailler encore plus pour donner encore plus. Surtout, ce qui m’a fait réaliser, c’est le moment de la remise des médailles. Quand il y a les hymnes nationaux qui passent. Quand on entend l’hymne national de son pays, c’est vrai que c’est quelque chose qui donne des frissons vraiment. On se rend compte, que c’est pour nous et qu’on a remporté.
Journaliste : Avez-vous eu du soutien du MINSEP ou du gouvernement camerounais ? Ou même des félicitations jusqu’à présent pour ce titre historique ?
Lorina Essomba : Par rapport au MINSEP, j’ai été ni contacté, ni accompagné par eux. Vraiment pour cette préparation et la qualification olympique et au championnat d’Afrique, j’ai eu aucun soutien de la part du MINSEP. Il y a uniquement mes efforts, mon entraîneur qui m’a accordé énormément de temps. Il a essayé de me préparer au mieux. Le président de la fédération qui a été à l’affût pour savoir quelle compétition j’allais faire. Et puis, il y a eu le soutien de mon club aussi, qui a financé mes coupes du monde tout au long de la saison et la fédération qui m’a financé les tournois et les championnats officiels. Bien-sûr j’ai le soutien de mes proches, ma famille, mes amis, mon compagnon. Mais vraiment, de ce côté là (MINSEP) j’ai pas été accompagné du tout. Au point que pour le tournoi de qualification olympique qui se déroule à Alger, j’ai dû ouvrir une cagnotte sur letchi où j’ai récolté la somme nécessaire pour pouvoir payer mon déplacement et celui de mon entraîneur. Pour l’instant, je n’ai pas eu de félicitations de la part du MINSEP non plus, par contre il y a Samuel Eto’o qui m’a félicité sur sa story Instagram. Après j’ai vu qu’il y avait pas mal de blogueurs qui m’ont encouragé et félicité, beaucoup de gens qui ont commenté. Un grand merci, ça me fait vraiment plaisir. Et ça me motive à faire encore plus. Même pour le gouvernement, j’ai pas eu de félicitations, ni d’encouragement. En tout cas pour le moment, j’ai rien reçu mais je ne vais pas m’arrêter à ça. Je vais continuer à faire ce que j’ai toujours su faire, m’entraîner, travailler de mon côté et puis essayer de briller lors des prochains événements dans la prochaine saison.
Journaliste : Hui, quels sont vos objectifs dans la suite de votre carrière ?
Lorina Essomba : Mes objectifs ? Alors là, je pense que je suis bien partie puisque je pars de zéro en ayant changé de nationalité. J’ai perdu tous mes points, déjà que j’en avais peu parce que je n’ai pas été présente pendant un an. Là je repars sur de bonnes bases. Pour les saisons à venir, j’espère pouvoir me qualifier pour les jeux olympiques 2028 à Los Angeles sans passer par le tournoi de qualification olympique. Puis après c’est d’être la meilleure africaine aux points et de pouvoir participer à toutes les coupes du monde. Pour ça, j’espère que j’aurai du soutien de la part du gouvernement si possible ou trouver des financements pour pouvoir partir en compétitions. Il faut les payer, c’est pas gratuit. Donc, j’espère de m’améliorer de saison en saison, de pouvoir continuer à représenter le Cameroun comme il se doit.
Journaliste : Quels sont vos rapports avec la fédération camerounaise d’escrime ?
Lorina Essomba : Il y a une fédération qui est peut-être pas connue qui est gérée par un président qui s’appelle Marcel Amougou. Et c’est ce président là qui s’occupe d’inscrire les tireurs [escrimeurs, ndlr] aux compétitions. Il n’a aucune subvention, aucune aide, c’est lui-même qui paie de sa poche pour les billets d’avion, pour l’hôtel, les restaurants. Donc il y a bel et bien une fédération d’escrime au Cameroun, elle est juste pas connue. Malheureusement, ce que je constate c’est qu’on s’intéresse qu’au foot alors que vous avez des disciplines par milliers où il y a des camerounais qui pourraient exceller mais ils sont pas soutenus par leurs fédérations par manque de moyens. J’ai vu que sur certains posts où on parlait de FECAFOOT que c’était grâce à Samuel Eto’o, non, non, je pense ces personnes là ne savent que j’existe. Je vis en France, je m’entraîne en France. Il y a pas d’aide, c’est pas le gouvernement ni qui que ce soit qui nous ont aidé, c’est vraiment nous et nos moyens.
Journaliste : Merci Lorina Essomba Mbega, de nous avoir accordé cette interview exclusive après votre sacre historique en sabre dame pour le Cameroun. Nous vous souhaitons de bonnes choses pour la suite de votre carrière.
Lorina Essomba : C’est moi qui vous dis merci. C’est une fierté pour d’avoir permis au Cameroun de se faire connaître dans cette discipline.