Samuel Eto’o est dans de beaux draps. C’est le moins que l’on puisse dire. A un tel point que l’avenir de l’ancien capitaine des Lions indomptables à la tête de la Fédération Camerounaise de Football (FECAFOOT) pourrait être remis en question suite à la fuite sur les réseaux sociaux d’une note vocale qui laisse à penser qu’il serait au courant et/ou impliqué dans la manipulation des rencontres des championnats camerounais.
Rappel des faits
Les jours se suivent et se ressemblent pour le président de la FECAFOOT depuis quelques semaines. Après les révélations incendiaires de Njalla Quan, ex vice-président de l’instance faîtière, remettant en cause le management opaque de son ancien patron, c’est une conversation téléphonique enregistrée à son insu par son interlocuteur, Nkwain Valentine (président de Victoria), en janvier dernier qui enflamme la toile.
Dans cet audio, Samuel Eto’o, dont la voix est perceptible, garantit la promotion d’un club de deuxième division à l’échelon supérieure : « Opopo doit monter en première division. Ça, c’est notre objectif […] C’est notre Fédération. Nous sommes quatre ; toi et 2 autres personnes. Victoria United va monter […] Toi tu sais que tu as le pouvoir de dire qu’on va suspendre telle personne parce qu’elle fait mal. On va faire ça. Mais n’entre pas dans le stade, ne m’arrête pas un match. Tu restes tranquille, tu portes les réserves, on te donne les trois points et on suspend l’arbitre […] De toutes les façons, je vais radier cet arbitre. Mais il faut que tu restes très discret parce que dès que tu fais quelque chose, on m’appelle ».
Au final, après une remontada, Victoria est promu en Élite One en fin de saison. Des déclarations surprenantes qui interviennent quelques jours après le match entre Tonnerre Kalara Club (TKC) et Opopo, match au cours duquel le président Nkwain Valentine avait fait interrompre la rencontre en raison d’un arbitrage qu’il jugeait douteux.
Des propos d’autant plus surprenants quand on sait à quel point les suspicions de trucage de matchs ont émaillé les championnats d’Elite cette saison. On a d’ailleurs tous en mémoire la colère du président d’Unisport du Haut Nkam, Donald Ngamenie, qui dénonçait déjà de tels faits en avril dernier. Ce dernier avait dans la foulée promis des révélations qui sont encore attendues aujourd’hui.
Cette tendance liée à la manipulation de matchs avait été également confirmée sans gêne le gardien de Victoria United, Idriss Youssouf, lors d’une note vocale partagée sur Whatsapp « Si Donald Ngameni ne donne pas l’argent aux arbitres, il devrait rester là, nous donnons parce que nous avons l’argent ». Le joueur sera ensuite limogée par son club.
Malgré la suspension de plusieurs arbitres, les polémiques lors des rencontres n’ont pas cessé pour autant. Certains hommes en noir ont même été passés à tabac par des supporteurs mécontents. Pour ce qui est de Samuel Eto’o, il semble désormais évident qu’il ait été au courant de ce manège qui consistait à protéger et favoriser certains clubs. Mais quel est son degré d’implication. Ces faits, s’ils sont avérés, pourraient précipiter sa sortie de l’instance de Tsinga.
Que risque Eto’o et Nkwain ?
La commission d’Ethique de la FECAFOOT, en se reposant sur la section 4 relative à l’intégrité des matchs et des compétitions, peut, via sa chambre d’instruction, lancer des investigations à partir de l’enregistrement audio. Ce dernier étant admis comme un moyen de preuve selon l’article 48 du code éthique. Toutefois, la nature d’une éventuelle sanction n’est pas précisée.
Article 24 de la Section 4 du Code d’Ethique de la FECAFOOT relatif à l’intégrité des matchs et compétitions
Il est interdit aux personnes auxquelles s’applique le présent Code de participer, directement ou indirectement – ou d’être associé de quelque manière que ce soit -, à des paris, jeux d’argent, loteries et autres activités ou transactions analogues en relation avec des matches de football. Il leur est également interdit de jouer un rôle, actif ou passif, dans les sociétés, entreprises, organisations, etc. qui encouragent, communiquent, organisent ou gèrent de telles activités ou transactions.
Bien qu’on en soit encore loin, la FIFA peut elle aussi décider à tout moment d’ouvrir une enquête pour tirer tout ça au clair. Pour une éventuelle implication dans la manipulation de matchs et par conséquent de compétitions, le président de la FECAFOOT encourt une interdiction d’au moins cinq ans d’exercer toute activité relative au football et une amende d’au moins 100 000 CHF (68 000 000 FCFA) conformément à l’article 18 du code disciplinaire de la FIFA. Si cela venait à se produire, il ne serait plus président de la FECAFOOT.
Le président de Victoria United, Nkwain Valentine, quant à lui, au-delà de risquer la même sanction, pourrait également voir son club déclaré inéligible pour le prochain exercice en Elite One.
Article 20 du code disciplinaire de la FIFA sur la Manipulation de matches et de compétitions de football
- Toute personne qui influence ou manipule illégalement – directement ou indirectement, par exécution ou omission d’un acte – le déroulement, le résultat ou tout autre aspect d’un match et/ou d’une compétition – ou qui conspire ou tente de le faire par quelque moyen que ce soit – est sanctionnée d’une interdiction d’au moins cinq ans d’exercer toute activité relative au football, ainsi que d’une amende d’au moins CHF 100 000. Dans les cas graves, l’interdiction d’exercer toute activité relative au football est prononcée pour une durée plus longue voire à vie.
- Si un joueur ou officiel est impliqué dans un comportement décrit à l’al. 1 du présent article, son association ou son club pourra voir le match concerné perdu par forfait ou être déclaré inéligible pour une autre compétition, sous réserve que l’intégrité de la compétition concernée soit préservée. Des mesures disciplinaires supplémentaires peuvent être imposées.
Reste à savoir si la Fédération Internationale choisira de se pencher sur le dossier. Quoi qu’il en soit, l’étau se resserre autour de Samuel Eto’o.